Je cherche des informations sur les armets savoyards, et leurs armures en général, notamment ceux conservés au Musée d'art et d'histoire

Je cherche des informations sur les armets savoyards, et leurs armures en général, notamment ceux conservés au Musée d'art et d'histoire


Réponse

Bonjour,

Nous vous remercions d'avoir fait appel au service Interroge, voici le résultat de nos recherches :

Dans un billet blog, publié le 12 décembre 2013 sur le site du Musée d’art et d’histoire de la Ville de Genève (MAH), José Godoy, conservateur honoraire de la collection des Armes du MAH, donne la définition du casque à masque appelé aussi armet savoyard.

Viollet le Duc dans son Dictionnaire des armes offensives et défensives : de l'époque carlovingienne à la Renaissance en affine l’explication : « Corruption du vieux mot français hiaumet, helmet (anglais), petit heaume. C’est le casque des milices du XVe siècle, qui succède au bacinet et qui se compose du tymbre avec ou sans crête ; de la vue, du nasal, du ventail ou plutôt de la ventaille. Ces dernières pièces mobiles étaient désignées ensemble sous le nom de mézail et de gorgerin. […] C’est le dernier habillement de tête du Moyen Age. L’armet était un habillement de guerre en ce qu’il était plus léger que le heaume, dont on ne se servait au XVe siècle que pour les joutes et tournois, et que le bacinet du XIVe siècle très fatigant à porter durant plusieurs heures. […] Son mécanisme permettait de voir et de respirer à l’aise. […]  Le gorgerin, très bien articulé, permet à la tête de faire tous les mouvements. […] »

Le musée de l’Armée à Paris parle de l’un des armets conservés dans leur collection d'armes insolites en ces termes : « […] Afin de permettre une meilleure perception de l’ouïe, les protections de joues ont été ajourées. […]. Enfin, un important colletin se fixe à la gorge de l’armet. […] Ces équipements correspondent à des défenses utilisées pour l’action militaire, ce qui explique leur côté massif, aucune partie du visage n’étant découverte. »

José Godoy, dans un article très complet et entièrement consacré à l’armet savoyard paru dans le bulletin du MAH Genava, en 2002, décrit ainsi cette pièce d’armure : « Le Musée d'art et d'histoire de Genève possède dans sa collection d'armures une intéressante série d'armets savoyards, ces casques de cavalerie à la face modelée ou pourvue d'ouvertures évoquant un visage humain. Ces armets proviennent traditionnellement du butin de l'Escalade, la tentative de prise de la ville de Genève par les troupes de Charles- Emmanuel Ier, duc de Savoie, dans la nuit du 11 au 12 décembre 1602 (selon le calendrier julien alors encore en usage à Genève), ou du 21 au 22 décembre du calendrier grégorien. La dénomination d'armet savoyard prend son origine dans la collection genevoise et remonte à 1869, année de la parution à Paris de l'important ouvrage d'Auguste Demmin intitulé Guide des amateurs d'armes et armures anciennes par ordre chronologique depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours. Dans ce manuel à caractère encyclopédique, l'auteur reproduit par le dessin six armes et quatre casques qui se trouvaient alors dans la Salle des Armures de l'Arsenal de Genève, et qui sont actuellement conservés au Musée d'art et d'histoire. L'un d'eux, le numéro 175 (inv. C 882), est accompagné de la légende : "Armet savoisien en fer noirci, du commencement du dix-septième siècle ; il a été pris sur la troupe de Branaulieu-Chaffardin [sic], tué en 1602 sous les murs de Genève, qu'il voulait surprendre." Dans ce cas, le terme "savoisien" sert à désigner la provenance historique du casque, un parmi d'autres armets de cuirassiers traditionnellement considérés à l'Arsenal comme ayant été portés par les assaillants savoyards.

À cette date, le "mythe" de l'armure savoyarde avait déjà pris forme à l'Arsenal, dans la nouvelle Salle des Armures et Collections historiques. Cela est attesté par A. Demmin décrivant l'Arsenal dans un autre de ses ouvrages, l'Encyclopédie des sciences, lettres et arts et revue panoptique de la Suisse :

"Les armures savoisiennes se distinguent facilement des genevoises : les premières, en tôle noire, ne pèsent que 120 livres, et ressemblent à celles des Bourguignons, tandis que les autres, comme presque toutes les armures suisses et allemandes, sont en fer poli et plus lourdes." A. Demmin nous transmet ici la croyance largement répandue dans la tradition populaire locale d'alors, mais toujours vivace, selon laquelle les armures blanches sont celles des Genevois ayant combattu contre les Savoyards, tandis que les noires étaient portées par ces derniers pour être moins repérables dans la nuit lors de l'Escalade : Si l'antagonisme entre Genève et la Savoie était une réalité politique en 1602, il n'était sûrement pas poussé au point de s'étendre à la couleur des armures. […] Les armures blanches et les armures noires ne sont pas contemporaines. Les premières datent toutes des alentours de 1575, tandis que les secondes, en partie composites, se situent entre 1580 et 1620. Tout en acceptant l'hypothèse que l'armement genevois ait pu être réutilisé au cours d'un laps de temps plus ou moins long, il faut noter que l'on a affaire ici à des armures séparées souvent par au moins une génération de combattants, et il est très peu probable que l'ensemble des troupes genevoises ait lutté en 1602 avec un armement démodé, voire désuet, et peu adapté aux nouvelles formes de combat. Sinon, les chroniqueurs de l'époque n'auraient pas manqué de souligner cette anomalie. Cette réflexion en amène une autre, concernant les armets à masque des armures noires, qui, malgré leur caractère étrange, n'ont nullement attiré l'attention ni dans les chroniques ni dans les divers récits de l'Escalade. Ce silence doit être compris comme résultant du fait que ces armets étaient alors courants et fort répandus dans les escadrons de cavalerie tant genevois que savoyards. »

Dans l'article De l'arsenal au musée : la Salle des Armures et sa collection, paru dans Genava en 2015, Corinne Borel décrit la constitution de la collection d’armes et armures du MAH :

« […] L'un des traits saillants de la présentation inaugurée par Gosse au Palais de Justice, qui perdurera jusqu'à l'installation de la collection au Musée d'art et d'histoire, est l'opposition, non dénuée de connotations morales, des armures "blanches" des Genevois et des armures "noires" des Savoyards, regroupées en deux massifs circulaires étagés. Pour spectaculaire qu'il soit, cet antagonisme s'avère toutefois plus symbolique qu'historique, ces équipements n'étant pas contemporains et de surcroît largement répandus dans l'ensemble des troupes européennes. Ainsi les armures blanches, destinées à la cavalerie légère, peuvent-elles être datées vers 1575, tandis que les noires, lourdes armures de cuirassier en partie composites, s'échelonnent entre la fin du XVIe siècle et 1620 environ ; ces dernières sont accompagnées des fameux armets "savoyards" à face évoquant un visage humain, dont la dénomination moderne trouve son origine dans la collection genevoise. Un petit nombre de témoins iconographiques permettent de compléter ces descriptions (fig. 4 et 5): comme jadis, les solives du plafond sont garnies de morions et de cabassets en rangs serrés, tandis que l'espace des murs est presque entièrement occupé par des alignements de casques et de cuirasses. On y retrouve également les compositions décoratives en "panoplie" déjà présentes au Palais de Justice, dispositif scénographique récurrent des présentations muséales de l'époque. »

Parmi les diverses armures conservées, voici la description de celle du pétardier Picot qui a tenté de forcer la porte de Neuve lors de l’Escalade :

« […] La tentative infructueuse du pétardier savoyard [Picot] est restée dans les mémoires grâce aux récits des contemporains de l’événement. […] tandis que le fameux Cé qu’è lainô, composé en 1603, a certainement contribué à populariser le personnage. Mais la figure de Picot est également familière aux Genevois grâce à l’armure qui lui est traditionnellement attribuée. Unique en son genre dans le fonds issu de l’ancien Arsenal, cette armure massive se distingue tant par son poids (près de dix-huit kilos) que par son épaisseur (de cinq à dix millimètres selon les parties). Avant tout destinée à protéger le haut du corps, car les pétardiers étaient particulièrement exposés au tir des assiégés, elle se compose d’un colletin, d’un plastron, d’une dossière et de fortes épaulières à sept lames articulées enveloppant les épaules et le haut de bras […] .»

Nous espérons que ces éléments vous aideront dans votre recherche. N'hésitez pas à nous recontacter pour tout complément d'information ou toute autre question.

Cordialement,

La Bibliothèque d'art et d'archéologie

Pour www.interroge.ch

  • Dernière mise à jour 26/04/2024
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